• MULAN (partie 1)

    C'est dans la nuit la plus profonde que notre histoire débute. Cependant, un homme est encore éveillé. Il fait les cent pas, d'un pas téméraire et vigoureux. Pourtant il est serein, car il sait qu'il n'est pas seul. Tous le long de l'imposante muraille de Chine, des gardes veillent, comme lui.

    Soudain, un aigle gigantesque vient briser ce silence en faisant tomber le casque du garde. Ce dernier se retourne, impuissant devant les harpons venus s'accrocher par dizaines sur les créneaux de la muraille. Aussitôt suivis d'un soldat, les harpons se multiplient. Le garde, ne sachant que faire, crie à l'aide, mais bientôt le plus redoutable de tous les soldats a fini de se hisser sur la pierre. C'est un homme imposant, de noir vêtu, les traits du visage déformé par la guerre, la haine et les cicatrices qui lui pourfendent le visage.

    Le garde, gardant son sang froid, se saisit d'une torche et en allume une autre, mais celle-ci est immense. Rapidement, d'autres lumières apparaissent, les unes après les autres, sur toutes la longueur de la muraille. "Maintenant toute la Chine sait que vous êtes ici.", déclare bravement le garde. D'abord paniqué, le soldat se saisit d'un drapeau chinois, le laisse brûler en chuchotant : "Parfait."

    Le général Li entre affolé dans la salle du trône, accompagné de deux de ses soldats, puis se prosterne devant l'empereur et son premier conseiller, Chi-Fu. "Majesté, les Huns ont franchis la frontière du nord !", annonce-t-il. Chi-fu répond en secouant la tête, méprisant : "C'est impossible, ils leur faut pour cela franchir la muraille de Chine. Non, je le répète, c'est impossible." Le général réplique alors : "Shan Yu le peut ! Il faut installer la défense autour du palais au plus vite !" L'empereur, qui jusqu'ici demeurait interdit, intervient : "Non, vous préparerez vos troupes pour protéger mon peuple, tandis que vous engagerez de nouvelles recrues dans chaque famille."

    "Calme et réservée. Avenante, polie, raffinée, posée… Ponctuelle !" note Mulan sur son bras, avant d'être surprise par le chant du coq, qui lui rappelle son retard. Elle s'empresse d'apporter le thé à son père, qui prit dans l'autel, dans l'espoir que sa fille inspire la Dame Marieuse. Alors qu'il la voit arriver, tasses à la main, il lui rappelle l'événement important qui l'attend et que l'honneur de la famille en dépend.

    Mulan arrive finalement en ville, où sa mère l'attendait devant une boutique. La jeune fille est maquillée, coiffée et habillée. Poudre sur le visage, robe splendide, Mulan est fin prête, cependant sa grand-mère tient à lui offrir un criquet porte-bonheur.

    Mulan, anxieuse, se dirige avec les autres jeunes filles à marier vers la demeure de la marieuse. Elle est la première à être appelée. Alors qu'elle répondait à l'appel d'un joyeux "Présente !", elle comprend vite qu'ici elle n'est pas libre de parler comme bon lui semble. Elle entre tout de même, précédée de la Dame Marieuse. Les portes à peine refermées, la femme l'inspecte déjà de la tête aux pieds, pour conclure sur : "Trop chétive, pas bonne pour porter un enfant". Mulan doit ensuite réciter les préceptes de bonne conduite. Ne les connaissant pas, mais les ayant écris sur son bras, elle déploie son éventail, pour pouvoir lire sans être vue. "Remplis tes devoirs calmement et respectueusement. Et raisonne pour mieux agir, ça t’apportera l'honneur et la gloire." La marieuse, loin d'être stupide, vérifie si sa disciple ne lit sur l'éventail en saisissant violemment le poignet de cette dernière, et imprégnant sa main de l'encre encore fraiche.

    Mulan doit à présent verser le thé, tandis ce que la marieuse, en se caressant le menton, se dessine une barbe à l'encre noire. Alors que la jeune femme remplit la tasse, le criquet porte-bonheur en profite pour sauter dans le liquide bouillant. La Dame Marieuse s'empare de la tasse, mais Mulan tente de la lui reprendre. Les deux femmes tirent quelques instants la tasse de leur côté respectif. Les doigts de Mulan glissent et la tasse est renversée dans la tête de la respectée marieuse. Aveuglée, elle s'assoit malencontreusement sur un tas de braises brûlantes. Elle sort de sa demeure en criant, l'arrière-train en feu. Mulan lui lance alors le reste du thé sur le visage, pour éteindre les flammes, avant de se réfugier aux côtés de sa mère et de sa grand-mère qui l'attendaient.

    "Tu as peut-être l'air d'une mariée, mais je jure que jamais tu ne trouveras de mari, jamais !", cria la Dame Marieuse, brûlée, mouillée, déshonorée.

    La jeune fille rentre chez elle désemparée. Alors que son père s'apprête à lui demander les nouvelles, dans la rue retentit un roulement de tambour, signe de l'annonce d'un événement important.

    Tandis que le père de Mulan se poste devant la porte de leur demeure, cette dernière grimpe sur le toit pour voir sans être vue et entendre sans être entendue.

    "Voici un message de votre empereur de la plus haute importance. Les Huns ont envahi la Chine. Dans chaque famille, un mâle devra s'engager dans l'armée.", proclame Shi Fu Un murmure de surprise et d'inquiétude parcourt l'assemblée des villageois, pendant que le premier conseiller du souverain remet solennellement les avis de conscription. Lorsque vient le tour de son père, Mulan s'interpose entre les deux hommes, tentant d'expliquer à Shi-Fu que son père s'était déjà battu bravement, et que sa jambe ne lui permettait plus de se battre normalement.

    Mais ce n'est pas suffisant, car Shi-Fu lance sèchement au vieil homme : "Vous devriez apprendre à votre fille à tenir sa langue en présence d'un homme. Vous vous présenterez au camps d'entraînement demain, à l'aube."

    Mulan s'effondre quand elle voit son père s'entraîner avec son épée et tomber son sol, souffrant.

    Pendant le repas, l'ambiance est électrique. Soudain, Mulan vient briser le silence glacial en reposant brutalement sa tasse sur la table. "Tu n'es pas obligé d'y aller ! Des centaines de jeunes hommes sont prêts à se battre pour la Chine." Soupir annonciateur de la tempête. "C'est un honneur pour moi de me battre et de servir mon pays.", chuchota-t-il en cachant sa colère derrière une apparence calme et sereine. "Alors tu mourras pour l'honneur ?", ajouta Mulan désespérée. "Car c'est ma place ; et il est grand temps que tu trouves la tienne !"

    La jeune fille s'enfuit et se recroqueville, seule, au milieu de la basse-cour. Elle se relève. Dans ses yeux un éclair. Son destin changé à jamais.

    En deux temps trois mouvements, elle est transformée : cheveux coupés, chignon masculin, armure, cheval. Mulan est devenue homme. Elle disparaît dans la nuit, mêlée au bruit régulier des sabots de son étalon sur le sol.

    Encore dans la demeure des Fa, Grand-Mère se réveille en sursaut, comme sortie du sommeil par le départ de sa petite-fille. Elle court en avertir les parents, qui constatent au bord des larmes l'armoire qui contenait l'armure vide. Vide.

    "Tu dois la ramener ! Elle pourrait se faire tuer…", pleure la mère en s'effondrant aux côtés de son mari dans la basse-cour. "Si je la dénonce, elle le sera…", lui répondit-il, la voix soudain éprise d'une profonde gravité.

    "Chers grands ancêtres, protégez Mulan, entendez cette prière.", murmura Grand-Mère.

     ∴

    Dans le temple, une ombre bleue se dessine, ronde et singulière, et dans un son grave et lourd, elle appelle celui qu'elle nomme Mushu. S'ensuit une discussion très particulière : "Réveille les ancêtres", proclame l'ombre.

    Mushu, dragon miniature, sonne dans un gong sur mesure en criant aux ancêtres de se réveiller. Des dizaines d'autres ombres bleues jaillissent alors des murs du temple. La première ombre, qui n'est en réalité rien d'autre que le Grand Ancêtre, énonce le problème à ses confrères : "Mes amis l'heure est grave. Mulan s'est déguisé en homme et s'est enfuie pour se présenter dans l'armée à la place de son père." Les ancêtres s'affolent ; les uns criant au déshonneur de la famille, les autres à la menace de mort pour Mulan. Mais il y a en tout cas un point sur lequel ils sont d'accord : il faut remédier à ce problème en envoyant pour protéger la jeune femme un gardien. Cependant là encore les Gardiens de la famille sont en désaccord : qui doit-on envoyer ? Le plus rusé ? Le plus habile ? Le plus avisé ? Soudain, le Grand Ancêtre met fin à la discussion en déclarant : "Non, il faut envoyer le plus puissant -le Dragon de Pierre." Mushu, ancien Gardien Dragon de la Famille désormais dégradé, va lentement vers la statut du Dragon de Pierre, en laissant traîner son gong -qui lui servira à réveiller le gardien- sur le sol. Il se poste devant ce dernier en lui grimpant progressivement dessus à l'aide de on gong. Les yeux bien en face de ceux de son rival. Il tente quelques secondes de sonner le gong, à contre-cœur. Mais le Dragon reste immobile. Mushu, en colère, frappe son oreille. Erreur fatale. Elle se casse, en entraînant avec elle tout le corps de Grand Dragon de Pierre.

    Mushu n'a pas le temps de s'en lamenter, le Grand Ancêtre appelle déjà le gardien : "Grand Dragon de Pierre ! Es-tu réveillé ?" Le petit dragon sursaute ; il ne sait que faire pour sauver sa peau. L'idée lui vient soudainement, il se saisit de la tête en pierre du gardien, heureusement encore entière. Il bredouille en assombrissant sa voix : "Oui, oui, c'est moi, le Grand Dragon de Pierre, je suis réveillé !" Celui qu'on appelait précédemment l'ombre bleue répond alors d'une d'une voix théâtrale : "Protège Fa Mulan, noble gardien !"

    À SUIVRE…

    Pour voir la partie 2, clique ici.

    Ariane


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